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Le Longdoz industriel (1): le travail des métaux

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S'il est actuellement un des plus densément peuplés de Liège, notre quartier garde encore certaines traces de son ancien passé industriel - traces "en creux" pourrait-on dire car il s'agit souvent de terrains vagues ou de friches.
Sur la photo ci-contre, prise dans les années 50, on distingue les toits si particuliers des anciennes usines encore en activité : vers le milieu ce sont les établissements Englebert. A hauteur du pont de Huy, ce sont les établissements Espérance-Longdoz tandis qu'à l'arrière-plan se dessinent les bâtiments allongés de la gare.

Nous avons dit qu'autrefois la Boverie était champêtre, que le Longdoz, comme quartier populeux, naquit du percement de la rue Grétry, de la construction des ponts de Longdoz et de la Boverie (futur pont Kennedy) ainsi que de l'installation de la gare. Mais il existait déjà ça et là une multitude de petits ateliers, généralement situés sur l'un ou l'autre bief de l'Ourthe, qui utilisaient l'eau comme force motrice, de leurs forges notamment. Car Liège fut de toujours la ville de la métallurgie
" Tout Liège n'est qu'un atelier où presque tout le peuple est occupé d'ouvrages en fer et en acier", Grosley, Voyage en Hollande, 1772, cité par Gobert.

Dès le début du 19es, on voit exploser l'activité industrielle; 80 ans plus tard, il y a sur le territoire de Liège et banlieue, 1744 usines ! D'abord familiales, les fabriques adopteront souvent le statut de sociétés anonymes et par des fusions, atteindront la taille nécessaire à l'expansion hors frontières.
L'un des grands noms de l'industrie liégeoise auquel le quartier a rendu hommage est Henri-Joseph Orban; il fut un novateur dans toute une série de domaines: 1er à avoir utilisé la machine à vapeur pour extraire le charbon, le 1er à avoir fait tirer par des chevaux des wagons sur des rails dans les mines, le 1er à avoir construit un bateau à voile avec coque de fer. Il avait aussi des laminoirs à Grivegnée. Il donna son nom à l'un des quais sur la Dérivation, là où furent exploités pendant longtemps des jardins potagers par des petits agriculteurs et où tournaient plusieurs moulins sur les biefs

Parmi le développement industriel, on trouve les usines Marcellis dont nous avons déjà parlé, et qui s'étaient installées dans un endroit prédestiné à la métallurgie puisque on y trouvait autrefois l'ancienne "fornaise où l'on fait le fer"; voir plan de 1572.
Vers l'amont de la future Dérivation se trouvaient les ateliers Dothée. Charles-Martin Dieudonné Dothée débute dans le commerce d'ustensiles de cuivre et de fer-blanc, puis en 1845, il se lance lui-même dans la fabrication avec l'appui de ses deux frères. Il récolte un tel succès qu'en 1847 il crée au Longdoz un important atelier pour la tôle, du fer et du fer-blanc. Sous sa direction, l'usine continue à créer de nouveaux procédés et à s'agrandir jusqu'à recouvrir un important espace du quartier avec des machines à vapeur comme source d'énergie, des fours pour transformer la fonte, des laminoirs de diverses formes et bientôt, le raccordement à la gare de Longdoz pour le transport des produits. Elle fusionna d'abord avec les charbonnages et hauts-fourneaux de l'Espérance (1862). Ceux-ci devinrent sous la direction de Charles Borgnet, en 1877 le grand ensemble sidérurgique de l'Espérance-Longdoz. Le musée de la métallurgie est installé dans l'ancienne usine de fer-blanc de Dothée.

En direction du Pont Neuf, on trouvait l'ancienne usine de construction Tilkin-Mention, sur une île disparue lors de la canalisation de la Dérivation. Frédéric Nyst, ingénieur qui avait créé un atelier à la Boverie, manquant bientôt d'espace, s'installe en 1866 sur le site actuel de l'ESAS, à l'angle de la rue Stouls (appelée alors rue de Huy) et de la rue d'Harscamp. Il se spécialise dans la fabrication mécanique de rivets. Le succès est au rendez-vous et en 1905, son usine devenue une nouvelle fois trop petite, il déménage vers Renory à Angleur. Nyst est aussi associé au développement de sociétés de tramways, ce qui explique que son nom fut donné à une rue dans le quartier d'Amercoeur, près des dépôts de la STIL/TEC.

L'entreprise qui suit n'est pas à proprement parler affectée au travail du métal mais elle en utilisa beaucoup dans la mise en oeuvre de ses produits et facilita son emploi dans la construction. Edgard Frankignoul naît dans une famille ouvrière en 1882, dans la banlieue liégeoise. Il travaille sur des chantiers de construction tout en suivant les cours de l’école industrielle de Liège. En 1909, il obtient un brevet pour un nouveau système de fondation, les "Pieux Franki", permettant de construire des ouvrages d'art ou des bâtiments extrêmement solides sur des terrains jugés auparavant impossibles. Il crée la «Société des pieux armés Frankignoul» puis la «Compagnie internationale des pieux armés Frankignoul» et la «SA Entreprises de génie civil au Congo». Il occupe jusqu'à 5000 personnes. La société a son siège rue Grétry et son fondateur donnera son nom au début du "boulevard de l'automobile".
Les pieux Franki représentent l'un des fleurons de l'industrie liégeoise. Aujourd'hui encore, tout en ayant fortement diversifié leurs productions, on les trouve sur tous les chantiers du monde. La photo en montre l'utilisation au Venezuela (cliché: Cie des Pieux armés Frankignoul, dans "Liège et l'Occident", ASBL "Le Grand Liège", 1958).

Comme témoignage du passé industriel, on peut encore signaler la rue Deveux, baptisée d'après la famille Deveux qui possédait de très nombreuses maisons ouvrières dans les années 1850. La rue du fer rappelle l'activité de la firme Dawans-Orban, fondatrice de la sidérurgie allemande à Dusseldorf, et qui possédait des terrains à travers lesquels fut tracée cette rue. Ou encore la rue de l'usine où étaient autrefois installées les usines Jowa et Cie. Terminons ce bref aperçu par la rue Armand Stouls qui porte le nom de l'ingénieur devenu directeur de l'Espérance-Longdoz en 1886.